Et si, la crise était apparue pour me sauver ?
Tout le monde ou
presque à moins d'habiter dans un vieux bled paumé au fin fond de la
Papouasie Nouvelle Guinée a écouter les médias nous relater la révolte
de nos compatriotes Guadeloupéens. 7 semaines de grève, un LKP
déchaîné, une économie en chute libre, des problèmes socio-culturelles
et j'en passe. Dans un autre contexte, pour être honnête, je ne pense
pas que j'y aurais prêté grande attention. Mais, depuis que mon
baroudeur des tropiques a croiser ma route, tout ce qui touche de près
ou de loin aux Antilles m'interpelle.
Mon baroudeur des
tropiques, lui, c'est mon amoureux. Ça fait 14 mois que nous
sommes "ensemble". Désormais, je peux me permettre de qualifier
notre relation de "sérieuse", même si effectivement lorsque nous nous
sommes rencontrés, cette possibilité s'avérait bien compromise. Déjà
parce que je ne croyais plus en rien sauf à l'idée que je terminerai
"vieille fille" dans le Périgord à gaver des oies mais aussi car il
avait prit soin de m'avertir qu'il n'était ici que de "passage" dans le
but de peaufiner son projet professionnel et qu'il aspirait qu'à une
seule chose c'était de retourner au plus vite en Guadeloupe.
Cette île, il y
avait déjà passé 15 ans de sa vie, mais, suite à une rupture
sentimentale douloureuse, il avait décidé de s'y en aller, pour
terminer par s'apercevoir que finalement l'endroit de la planète où il
se sentait le mieux pour vivre, c'était bien là bas. C'est à l'âge de
19 ans, que son envie de "barouder" a commencer à le titiller
sérieusement. Il se tire de chez ses parents avec 2000 Francs en poche,
persuadé qu'il pourrait faire fortune en devenant chercheur de
diamants. A son arrivée à Caracas, il n'y trouvera que
des bars à putes, et un bolivar en pleine inflation. C'est alors, qu'il
décide de poursuivre son périple ailleurs en traversant la Colombie, pour finir au Brésil à Belém dans un bateau de fret qui le déposera au port autonome de Pointe à Pitre. Sous le charme de la Caraïbe, il décide d'y tenter sa chance. D'opportunités en opportunités, à 22 ans, il monte sa première entreprise, roule en berline, s'installe dans une jolie maison dans les hauteurs de Gosier, et "oubli" les mois et mois de galère qu'il vient de traverser en dormant dans la rue sur des feuilles du journal "France-Antilles".
Je suis prévenue que notre "idylle" ne pourrait être que temporaire et qu'un beau matin si par hasard elle devait excéder plus de 48 heures, celle-ci s'achèverait sur un coup de fil où il m'annoncerait son retour sur sa "terre promise". Sauf, que j'étais loin de m'imaginer que mon cœur marcherai encore et que je tomberai folle amoureuse de ce monsieur de 14 ans mon aîné. La vie est une telle farce, que 14 mois plus tard, il est toujours là !. Chaque jour qui passe nous devenons de plus en plus complice, de plus en plus proche, de plus en plus aimant. J'ai chaque fois encore plus de "papillons" dans le ventre quand il me prend dans ses bras.
Bien que je sois friande de cocotiers, plage, lagon bleu canard, punch coco, hamac, moi, la franco-brésilienne, l'éternelle amoureuse des tropiques depuis que je suis en age de faire la différence entre un marronnier et un palmier, qui fait en sorte d'organiser sa vie depuis ces dix dernières années pour avoir le privilège de passer 2 mois au soleil près de ceux qui lui sont chers de l'autre côté de l'atlantique, étrangement, je ne m'imagine pas en train de faire mes valoches et dire "au revoir" à ma famille formidable et mes amis. Pourtant, quand je m'amuse à remplir les questionnaires à la con des revues de filles, je n'hésites jamais à cocher la case " par amour, je serais prête à suivre celui que j'aime à l'autre bout du monde". Mais, dans la vraie vie, ce n'est pas si simple que ça que d'assumer le résultat qui s'y découle " femme aventurière, dévorée par la passion, vous seriez prête à tout pour celui que vous aimez !". Prête à tout...Prête à tout..., oui je l'aime et oui bien sûr que je n'ai pas envie qu'il parte encore moins sans moi...évidemment, ça va de soi que je voudrais encore et encore pouvoir additionner des 14 mois + 14 mois + 14 mois + 14 mois...mais j'ai la trouille, BORDEL !
Oui, la trouille,
la trouille de vivre ailleurs qu'ici même si tous les matins je peste
contre le froid, les gens, les embouteillages...la trouille d'être loin
de ma famille formidable même si à 32 ans il est temps que je coupe le
cordon...
Bah, ouais, j'ai les pétoches, les chocottes, les miquettes...quoi...
Dès que le sujet
est abordé, je pisse tellement dans mon froc, que je fais l'autruche,
je fais comme si je n'avais pas entendu qu'il venait de me dire qu'il
ne voyait pas l'heure de "rentrer chez lui", je me rétracte tel un
escargot dans sa coquille et j'attends gentiment dans mon coin que le
cyclone passe. Seule technique que j'ai trouvé, pour ne pas tomber dans
une masturbation abusive de cerveau.
J'avais réussi à
gratter quelques mois. Pas folle la guêpe. J'avais tout fait pour qu'il
intègre cette formation, d'une part parce que j'étais convaincue
qu'elle ne pouvait lui être que bénéfique, d'autre part l'échéance
se voyait repousser à 7 mois, et 7 mois dans ces circonstances, et bien
c'est toujours bon à prendre. D'ici 6 semaines, nous arriverons au bout. Et, là évidemment le signal d'alarme sera de nouveau
réactivé. Avant d'envisager une réinstallation, il aurait aimé pouvoir
décrocher un contrat de 6 mois, n'importe où dans le bassin
méditerranéen afin de pouvoir acquérir une certaine expérience dans ce
nouveau domaine d'activité avant de se lancer dans la création d'une
société. Là, par contre, je reste sereine, car l'idée de le
suivre quelques mois en sachant que ce n'est que ponctuel, à 2 ou 3
heures de vol de Paris, ne me fait absolument pas peur. Au contraire, je
prendrai ça d'avantage pour des vacances prolongés. Mais, compte tenu
du fait qu'il ne soit pas libre immédiatement, ce projet ne pourrai voir le jour que l'hiver prochain. Sauf que d'ici là, je crains qu'il pète les plombs et qu'il décide sur un coup de tête de prendre un billet d'avion.
C'est là donc que
je me dis, mais après tout et si la crise pour moi était bénéfique ?
Oui, car en Guadeloupe on ne peut pas dire que ça va fort et que c'est un endroit
propice à l'expatriation. Pour être franche, plus j'entendais que la situation se dégradait, plus je m'en réjouissais, c'est certes carrément dégueulasse, mais, après tout peux être que cette crise qui désespère tant de monde, est-elle tout simplement apparue pour me sauver ?
Signe du destin ? bon, d'accord ce n'est pas parce que l'économie va mal, qu'il n'y a pas encore des fous pour croire que leur rêve peut devenir réalité, et puis HEUREUSEMENT dans un sens, car on se fait déjà assez chier comme ça...